Le débat autour de l’avant-projet de la nouvelle Constitution suscite des inquiétudes majeures chez les acteurs politiques guinéens, en particulier concernant la participation du Président de la Transition, Mamadi Doumbouya, et des membres de son gouvernement à la prochaine élection présidentielle. Le manque de clarté sur la possibilité ou l’impossibilité pour ces dirigeants de se porter candidats à la fin de la transition soulève des doutes légitimes, exacerbés par l’inclusion de dispositions relatives aux candidatures indépendantes.
Ci-dessous, copie de la déclaration :
Monsieur le Président du Conseil National de la Transition.
Nous, Partis Politiques membres de l’Alliance Nationale pour l’Alternance et la Démocratie attirons par la présente votre attention sur l’importance de reconduire, dans les dispositions transitoires du projet de Constitution, les articles 46, 55 et 65 de la Charte de la Transition relatifs à la non candidature des responsables de la Transition, conformément aux engagements pris solennellement par le CNRD devant le peuple de Guinée et la communauté internationale.
Comme vous le savez, l’article 46 de la Charte de la Transition stipule sans ambiguïté : « Le Président et les membres du Comité National du Rassemblement pour le Développement ne peuvent faire acte de candidature ni aux élections nationales ni aux élections locales qui seront organisées pour marquer la fin de la Transition. » Cette interdiction est un principe fondamental destiné à garantir l’impartialité et l’intégrité du processus électoral de sortie de Transition.
L’article 55 complète cette interdiction en précisant : « Le Premier Ministre et les membres du Gouvernement ne peuvent faire acte de candidature aux élections locales et nationales qui seront organisées pour marquer la fin de la Transition. » L’objectif est clair : prévenir tout conflit d’intérêt et assurer une gestion transparente et apolitique de cette période cruciale.
En plus, l’article 65 ajoute : « Les fonctions de Président, de Vice-présidents et de membres du Bureau du Conseil National de la Transition sont incompatibles avec l’exercice de tout autre mandat ou responsabilité publique ou privée pendant la Transition. Les membres du Conseil National de la Transition ne peuvent faire acte de candidature ni aux élections locales, ni aux élections nationales qui seront organisées pour marquer la fin de la Transition. » Ce cadre législatif interdit strictement aux membres du gouvernement et du CNT toute possibilité de se maintenir au pouvoir même par le biais des élections.
Le caractère intangible des articles 46, 55 et 65 susmentionnées, a été, en outre, expressément consacré à la fin de chacun d’entre eux en ces termes: « Cette disposition ne peut faire l’objet de révision ».
Ce n’est d’ailleurs pas un hasard si ces articles 46, 55 et 65 de la Charte de la Transition sont les seules à avoir été ainsi déclarés intangibles et insusceptibles de révision.
Même avec l’entrée en vigueur d’une nouvelle Constitution et l’abrogation de la Charte de la Transition, ces dispositions intangibles resteront en vigueur.
C’est pourquoi leur omission dans la future Constitution constituerait une violation flagrante de la lettre et de l’esprit de la Charte de la Transition que le Président de la Transition a juré de respecter et de faire respecter.
En outre, la reconduction des articles 46, 55 et 65 dans les dispositions transitoires de la Constitution, n’est nullement une manière d’individualiser ou de personnaliser la Constitution. Il s’agit plutôt de rendre effectif le respect des dispositions proclamées intangibles de la Charte de la Transition.
En conséquence, nous exigeons la réintégration des articles 46, 55 et 65 dans les dispositions transitoires du projet de Constitution à soumettre au référendum.
En outre, leur omission violerait l’article 25 alinéa 4 de la Charte africaine de la démocratie, des élections et de la gouvernance qui dispose en effet: « Les auteurs de changement anticonstitutionnel de gouvernement ne doivent ni participer aux élections organisées pour la restitution de l’ordre démocratique, ni occuper des postes de responsabilité dans les institutions politiques de leur État. »
Nous n’avons abordé dans cette lettre qu’un seul point important des critiques que nous avons à l’égard de l’avant-projet. Le reste de nos critiques fera l’objet d’un mémorandum que l’on vous fera parvenir incessamment.
En espérant que vous prendrez toutes les dispositions pour tenir compte de ces observations vitales pour notre jeune démocratie, veuillez agréer, Monsieur le Président, l’expression de nos sentiments distingués.
Conakry, le 20 août 2024
L’ANAD
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