Dans le cadre juridique de notre pays, la dignité de la personne humaine bénéficie d’une protection particulière assurée par le législateur. Ainsi, le code pénal interdit notamment tout acte, qu’il s’agisse de paroles, gestes, menaces, écrits ou images de toute nature non rendus publics, ou encore l’envoi d’objets quelconques à une personne exerçant une mission de service public. Ces actes, lorsqu’ils sont réalisés dans l’exercice ou à l’occasion de cette mission et qu’ils portent atteinte à la dignité de la personne ou au respect dû à sa fonction, constituent un outrage. Nous partons du postulat que le juge n’a pas fait application de l’article 747 du codé de procédure pénale qui a notre sens ne respecte pas le principe général relatif au double degré de juridiction et à l’impartialité du juge .
Le magistrat, en tant qu’agent public de l’ordre judiciaire, a pour rôle de rendre la justice ou de requérir au nom de l’État l’application des lois. Cette analyse se concentrera exclusivement sur les situations où le magistrat est victime d’un outrage, sans aborder les cas où il pourrait être auteur de l’infraction. En effet, ces derniers relèvent d’une procédure spécifique définie par les lois organiques relatives au statut des magistrats et au Conseil supérieur de la magistrature.
Bien que rares, des cas où des citoyens tiennent des propos portant atteinte à la dignité ou au respect d’un magistrat peuvent conduire à la mise en mouvement de l’action publique. L’étude de ce sujet vise à clarifier les règles procédurales applicables en cas d’outrage à magistrat et à lever toute ambiguïté concernant la compétence juridictionnelle.
La question centrale est donc : toutes les juridictions sont-elles compétentes pour juger le délit d’outrage à magistrat ?
Pour y répondre, il est nécessaire d’abord de définir précisément le délit d’outrage à magistrat (I), avant d’examiner quelle juridiction est compétente pour en connaître (II).
I-La qualification du délit d’outrage à magistrat
Le délit d’outrage peut valablement être commis à l’égard de n’importe quel fonctionnaire (A) mais il est particulièrement plus grave quand il est commis à l’égard d’un magistrat (B)
A- le délit sur le fondement du principe de légalité
Il est inscrit dans la déclaration universelle des Droits de l’homme de 1948 en son article 11 tout comme il est aussi prévu par l’article 12 de la charte de la transition et par l’article 5 du code pénal guinéen qu’il n’y a ni infraction ni peine sans texte de loi. Ainsi, la loi L2016/059/AN en date du 26 octobre 2016 portant code pénal guinéen a, à travers l’article 656 a défini et puni le délit d’outrage. Selon les disposition de l’article 656 du code pénal guinéen qui dispose « Constituent un outrage, puni de 16 jours à 6 mois et d’une amende de 500.000 à 1.000.000 de francs guinéens ou de l’une de ces deux peines seulement, les paroles, gestes ou menaces, les écrits ou images de toute nature non rendus publics ou l’envoi d’objets quelconques adressés à une personne chargée d’une mission de service public, dans l’exercice ou à l’occasion de l’exercice de sa mission, et de nature à porter atteinte à sa dignité ou au respect dû à la fonction dont elle est investie »
Selon cette disposition, toute personne, sauf en cas d’irresponsabilité pénale prévue à l’article 21 du même code, commet une infraction si elle tient des paroles ou profère des menaces, accomplit des gestes, rédige ou imprime des écrits ou images de toute nature non rendus publics, ou encore envoie des objets quelconques à une personne investie d’une mission de service public. Cela inclut notamment les fonctionnaires ou contractuels temporaires ou permanents de l’État, dans l’exercice ou à l’occasion de l’exercice de leurs fonctions. Ces actes doivent être de nature à porter atteinte à la dignité de la personne ou au respect dû à sa fonction.
Il convient de noter que ce délit repose sur la réalisation d’un acte matériel, car il s’agit d’une infraction d’action et non d’omission. Cet acte peut se traduire, par exemple, par des gestes déplacés envers une personne exerçant une mission de service public, qu’il s’agisse d’un secrétaire, d’un député ou d’un fonctionnaire en pleine exécution de ses fonctions ou en route pour les accomplir.
Il n’est pas nécessaire que les gestes, paroles, images ou écrits soient rendus publics pour que l’infraction soit caractérisée. Même s’ils restent privés, dès lors qu’ils portent atteinte à la dignité ou au respect de la victime investie d’une fonction publique et qu’ils sont commis pendant l’exercice ou à l’occasion de l’exercice de cette fonction, l’acte matériel est constitué.
Sur le plan moral, il est indispensable que l’auteur ait eu l’intention délibérée de porter atteinte à la dignité ou au respect de la victime. Cela rappelle que le délit d’outrage est une infraction intentionnelle, comme précisé dans le premier alinéa de l’article 15 du code pénal guinéen. Il ne peut donc s’agir d’une infraction résultant de négligence ou d’imprudence. Pour établir cette infraction, il est impératif de prouver la volonté consciente de l’auteur de transgresser la loi pénale. Toute supposition ou présomption est ainsi écartée.
Maintenant qu’on sait la définition d’outrage il faut articuler au tour du fait que la victime soit magistrat.
B- Le magistrat victime d’outrage
Les magistrats tout comme les autres fonctionnaires sont protégés contre l’atteinte à leur dignité mais leur protection est renforcée par la loi organique portant statut particulier des magistrats en son article 24 qui dispose « Indépendamment des règles édictées par le code pénal et les lois spéciales, les magistrats sont protégés contre les menaces et attaques, de quelque nature qu’elles soient, dont ils peuvent faire l’objet dans l’exercice ou à l’occasion de l’exercice de leurs fonctions. » Il ressort clairement qu’au-delà du fait qu’il soit protégé la loi ordinaire qui est le code pénal il est aussi protégé par la loi organique portant statut particulier des magistrats.
Le code pénal guinéen à travers l’article 663 définit l’infraction en ces termes « L’outrage fait par écrits, paroles, gestes, menaces ou envoi d’objets quelconques dans la même intention et visant un magistrat ou un assesseur dans l’exercice ou à l’occasion de l’exercice de ses fonctions, est puni d’un emprisonnement de 1 à 6 mois.
Si l’outrage a eu lieu à l’audience d’une cour ou d’un tribunal, il est puni d’un emprisonnement de 1 mois à 2 ans.
Lorsqu’un ou plusieurs magistrats ou assesseurs des cours et tribunaux, ont reçu, dans l’exercice de leurs fonctions ou à l’occasion de cet exercice, quelque outrage par paroles, écrits ou dessins non rendus publics mais tendant, dans ces divers cas, à porter atteinte à leur honneur ou leur délicatesse, celui qui leur a adressé cet outrage est puni d’un emprisonnement de 1 mois à 2 ans. »
L’analyse de cette disposition révèle que le fait, pour une personne, d’adresser des écrits, paroles, gestes, menaces ou objets quelconques à un magistrat, avec l’intention de porter atteinte à sa dignité ou de manquer de respect à sa fonction, constitue l’infraction d’outrage à magistrat. Cette infraction est caractérisée lorsque ces actes sont commis pendant que le magistrat exerce ses fonctions ou à l’occasion de leur exercice.
Il convient toutefois de préciser que l’application de cette disposition exige que la victime prouve sa qualité de magistrat. Par ailleurs, le législateur étend cette protection aux assesseurs, au même titre qu’aux magistrats. Cette distinction est importante, car tous les assesseurs ne sont pas magistrats, bien que tout magistrat du siège puisse être assesseur. Ainsi, les assesseurs des tribunaux du travail bénéficient également de la protection prévue par l’article en question.
Une fois l’infraction constituée, son auteur peut être condamné à une peine d’emprisonnement allant de 1 mois minimum à 2 ans maximum, sous réserve des dispositions des articles 117 et 135 du code pénal. Il est important de noter que l’article 663 du code pénal ne prévoit pas de peine d’amende pour cette infraction. En conséquence, le juge ne pourra pas prononcer une amende, conformément au principe de légalité.
Pour prononcer une peine il faut obligatoirement contrôler sa compétence préalablement.
II- De la juridiction compétente :
Pour rester fidèle à la méthode pédagogique et scientifique, il serait mieux de déclarer que toutes les juridictions ne sont pas compétente pour juger ce delit de droit commun (A) avant de préciser ou au moins rappeler les règles de compétence en la matière (B).
A- Certaines juridictions incompétentes
Dans la loi ordinaire portant réorganisation judiciaire complétée par la loi sur les juridictions de commerce ainsi que les ordonnances 007 et 008 sur la CRIEF, il est précisé qu’en droit guinéen tout comme dans plusieurs pays nous avons des juridictions de droit commun donc aptes à juger toutes les infractions dont la compétence n’a pas été spécialement affectée à une autre juridiction c’est notamment le tribunal de première Instance de Mafanco, de Dixinn, de la justice de Paix de Dalaba j’en passe. A côté des juridictions de droit commun, il y a les juridictions d’exception qui sont compétentes en raison du statut des personnes qui sont justiciables devant elles, c’est notamment le tribunal pour enfant de Conakry, la haute cour de justice, etc… Il y a une autre juridiction qui est à notre entendement est une juridiction spécialisée c’est le cas notamment de la Cour de Répression des Infractions économiques.
Maintenant, qu’a supposé lors d’une audience devant la cour suprême ou la cour d’appel de Conakry, ou le tribunal pour enfant voir devant une juridiction spécialisée, un magistrat est victime d’outrage en pleine audience ou à l’occasion de l’exercice de ses fonctions, l’agent pénal ne peut pas être jugée devant ces juridictions (Cour d’appel, tribunal pour enfant, cour suprême ou une juridiction spécialisée) tout simplement parce que ces juridictions n’ont pas la compétence matérielle de juger les infractions de droit commun en première instance si ces infractions sont commises par une personne ordinaire.
Dans l’hypothèse où l’auteur de l’infraction est mineur c’est le tribunal pour enfant qui sera compètent, si l’auteur est un militaire ou enseignant, ou commerçant, c’est le tribunal de première instance qui sera compètent. Même si le magistrat victime n’est pas du tribunal de première instance, même si l’infraction a été commise en pleine audience de la cour d’appel ou de la cour suprême.
L’essentiel c’est de comprendre que le fait que l’infraction soit commise en pleine audience dans une juridiction supérieure, ou spécialisée ou d’exception n’est pas attributive de compétence.
De plus, le principe de double degré de juridiction doit obligatoirement être observé si et seulement si l’auteur de l’infraction n’est pas magistrat ou OPJ, car, en droit guinéen ces deux catégories de personne ne bénéficient pas du double degré de juridiction.
B-De la juridiction compétente
Dans les écritures ci-haut, il a été démontré que les juridictions d’exception, supérieures, ou spécialisées n’ont pas la compétente pour statuer sur les infractions de droit commun commises par des personnes ordinaires. Alors, lorsqu’une personne ordinaire, notamment un enseignant, un médecin, un commerçant, ou toute autre personne qui n’est pas mineure, OPJ, avocat, notaire, magistrat, ministre, etc, est soupçonnée d’avoir commis une infraction d’outrage à magistrat au cours d’une audience les règles de compétences ordinaires doivent être observées.
A supposé que l’infraction est commise au cours d’une audience de la Cour des Comptes, de la Cour Suprême, de la Cour d’Appel, pour engager les poursuites, le Procureur de la République ou la victime doit saisir le Tribunal de Première Instance donc juridiction de premier degré, soit du lieu la commission de l’infraction, soit du lieu de résidence, ou d’interpellation de l’auteur de l’infraction. Il ne faut pas occulter que dans l’hypothèse où il y aura détention, la juridiction du lieu de détention est également compétente.
Cependant, lorsque l’auteur de l’infraction est un ministre en fonction la juridiction compétente sera la haute Cour de justice, et si l’auteur est un mineur, le tribunal pour enfant sera la juridiction compétente.
Les règles de compétences sont d’ordre public, ainsi, doivent être observée à tout moment. Bref, une juridiction d’exception, ou spécialisée, même les juridictions supérieures ne sont pas compétentes pour juger les infractions de droit commun commises par les personnes ordinaires, en premier ressort, cela s’oppose carrément aux règles de compétence et au principe de double degré de juridiction.
Mamadou Dian DIALLO
Enseignant chargé du cour de procédure pénale
Membre du Conseil d’Administration du l’Institut Africaine de la Réflexion Stratégique
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